Expositions

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GALERIE SEGUIER

Présence palpable

Natalia Jaime-Cortez & Alex de Bruycker

du 25 mai au 7 juin

Natalia Jaime-Cortez

Sur papier et à l’encre, Natalia Jaime-Cortez dessine. Ou plus exactement, sculpte. Car une fois achevées, les feuilles allongées qu’elle plie, froisse, repasse, découpe, trempe et assemble, prennent de la place. Empilées au sol ou « déposées » sur des tiges de métal, elles chutent ou se tiennent debout, les unes contre les autres, parchemins ou patrons de couture, rideaux ou « lambeaux » de peaux délavées. Souvent, Natalia Jaime-Cortez danse avec elles. Ses chorégraphies reconstituent les faits et gestes de l’atelier, dont le sol incliné hasarde des « jus », ces bains aussi révélateurs que ceux dans lesquels elle plongeait, à l’origine, ses photographies. Des pigments de couleur y imprègnent ses papiers thaïlandais, d’ordinaire réservés à la calligraphie. Fins et pourtant résistants, ils ont déjà bu sans soif l’eau de pluie, des marais salants de Guérande, du Mékong, de l’Euphrate, allant de par le monde, passant de mains en mains, toutes baladeuses. « C’est un travail de flaques », résume Natalia Jaime-Cortez, formée à l’art de la fresque, dont la palette orage - parme, brun, rouille, indigo - se teinte de nuances pâles, comme les murs d’Italie au Quattrocento. Dernièrement, sa manière fluide s’est encore allégée : de simples lés, presque monochromes, se chevauchent à peine. Côte à côte, pleins de bulles, de sillons, ils ont l’air d’étangs, de ciels, de paysages. En somme, d’impressions. Leurs effets d’atmosphère rappellent les Nymphéas de Monet qui donnaient « l’illusion d’un tout sans fin, d’une onde sans horizon et sans rivage ».

Virginie Huet

Alex de Bruycker 

“ Tout passe et rien ne demeure ”. Alex de Bruycker a fait siennes la formule d’Héraclite comme la pensée Wabi-Sabi. Lui aussi voit la beauté dans l’imperfection et sait l’humilité, la souplesse que requièrent les choses de la vie, par essence instables. Ses toiles changeantes, opaques et transparentes, en sont la pure expression. Il ne s’agit d’ailleurs pas de toiles à proprement parler, puisque Alex de Bruycker, ex-ingénieur textile, a remplacé le support classique par une soie solide, tendue de la même manière, sur un châssis en bois. Ce voile synthétique est d’abord partiellement enduit d’un mélange spécial avant que les couches d’acrylique, superposées aux zones apprêtées ou gardées intactes par des bandes de scotch, ne laissent plus ou moins voir à travers. L’attente est longue entre chaque passage du pinceau, cet archet qui produit, sur la mousseline raide, le son d’un violon. C’est ainsi : la peinture doit sécher. Elle est une “croix défigurée”, un volume ajouré fait “d’arches et d’arcs”, une géométrie tremblée formée de blocs isolés ou de larges aplats pleins de traces. Son art minimal rappelle celui de Günther Förg, comme lui féru d’architecture et de photographie, ou celui, plus radical, de Lucio Fontana. Car Alex de Bruycker travaille la lumière et l’espace, et ses compositions mènent toutes vers d’autres dimensions. Il ne peut en prédire l’issue. Mais il a en revanche une idée arrêtée des couleurs à marier : cappuccino, menthe, prune, orange sanguine… Un manteau croisé dans la rue suffit à l’inspirer. Testées sur papier calque, ces nuances sourdes ou vives migrent vers le cadre, pareils à des rayons traversant une fenêtre embuée.  

Virginie Huet

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EXPOSITIONS À VENIR

Ethan Caflisch & Yosigo Septembre

Delphine de Luppé & Tanguy Tolila - Novembre

EXPOSITIONS PASSÉES

La texture du temps

La texture du temps, une exposition personnelle de Claire de Chavagnac Brugnon

Du 1er au 31 mars 2016

Voici, me dit Claire de Chavagnac Brugnon, en me montrant son carnet : une promenade que j'ai faite à Amsterdam. La première chose qu'on voit sur la page, c'est une série de taches, chacune aussi petite que l'empreinte d'un chat. Non, ce qu'on voit, c'est un rythme de couleurs, partant de la gauche vers la droite et du haut vers le bas. Ce qu'on voit, on l'entend - presque. 

Dans le balancement entre l'œil et l'oreille on est pris, comme nous prend un morceau de musique à la radio en voiture ; on arrive à destination sans éteindre le moteur ; même à l'arrêt, le mouvement reste irrésistible. En l'occurrence, celui d'un trajet à Amsterdam, où un jour l'artiste s'est promenée. Ces tons rappellent des pavés luisants, des reflets fluides des vitres sur les canaux, des lames du ciel coupant les profondeurs glauques de l'eau. Ce qui importe, pourtant, ce n'est pas l'origine mais le jeu des couleurs, le rythme des signes, leur ricochet sur le regard et l'ouïe du présent. Chaque empreinte est tour à tour la traduction du souvenir en lumière, de la lumière en pigment, du pigment en écriture musicale.


Extrait du texte de l'écrivain Denis Hirson dans "Claire de Chavagnac-Brugnon, LA TEXTURE DU TEMPS" aux éditions Lelivredart, 2014.

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