Les Akaris

Isamu Noguchi, maître incontesté de la sculpture moderne et de l’art décoratif nippo-américain, naît en 1904, d’un père poète et d’une mère journaliste, à Los Angeles. Il passe son enfance au Japon, son adolescence aux États-Unis, à l’image de sa vie adulte qui sera un constant voyage entre l’Orient et l’Occident. Après ses études, il s’installe à New York, y découvre l’avant-garde artistique des années 20, travaille dans l’atelier de Constantin Brâncuşi, se passionne pour le mouvement d’art populaire japonais Mingei. Les années passent et Isamu Noguchi devient architecte, designer, peintre, céramiste, concepteur de jardins, mais aussi set designer.

 

 

En 1951, alors qu’il se rend à Hiroshima pour l’édification d’un pont, Noguchi assiste, lors d’une halte à Gifu, à la pêche aux cormorans, éclairé par des “chōchin”, des lanternes en papier produites dans la région, décorées à la main et illuminées par des bougies. Cet incroyable spectacle est, pour l'artiste multidisciplinaire, une véritable révélation. Il se rend dans l’entreprise familiale qui produit ces lampions depuis des décennies et découvre une technique ancestrale à base de tiges de bambou et de washi, un papier traditionnel très résistant obtenu à partir de fibres de mûrier. Noguchi, tout de suite, imagine décliner les formes accordéons de ces lampions et remplacer les bougies par l'électricité. Voilà la naissance de l’iconique lampe Akari dont nous fêtons cette année le soixante-dixième anniversaire. Cette œuvre d’art si fragile, à la fois utilitaire, rencontre un succès immédiat à l'international. Ce succès Noguchi l’explique ainsi : “Je crois qu’Akari est un véritable développement d’une vieille tradition. Ce que j’ai fait, c’est faire entrer un art ancien dans notre art moderne en intégrant l’électricité.”

 

 

Les lampes Akari, brillantes de simplicité, prouvent que le papier se sculpte aussi bien que le bronze ou l’argile et que l’art décoratif peut engendrer une véritable frénésie. Aujourd’hui, ces lampes se chinent ou s’arrachent à prix d'or, la fabrication artisanale (six heures en moyenne pour une pièce) doit suivre pour toujours maintenir en vie cette lumière unique.