Hilma af Klint

Si les peintures d’Hilma af Klint sont aujourd’hui exposées aux côtés de celles de Piet Mondrian, Vassily KandinskyFrantiseck Kupka ou de Kazimir Malevitch, ce ne fut longtemps pas le cas. L’artiste suédoise, née en 1862, développa avec des décennies d’avance, et dans la plus grande discrétion, un langage abstrait unique complètement avant-gardiste, imprégné d'ésotérisme et de spiritualité. Mais ce n’est qu’en 1984 que son œuvre ressurgit des profondeurs de l’oubli. Le monde découvrit alors, estomaqué, le travail de cette “pionnière” de l’abstraction, des toiles que l’on croirait sorties des années 70 ! Pourquoi donc Hilma af Klint resta-t-elle si longtemps dans l’ombre ? Comment cette femme découvra-t-elle, des années avant tout le monde, le monde de l’abstraction ? Et où cette artiste mystérieuse trouva-t-elle l’influence nécessaire à la création de son univers mystique ?

 

Hilma af Klint exposa et vendit quelques-unes de ses œuvres classiques mais ne montra jamais son travail abstrait à ses contemporains. La peintre, qui jugeait que le monde n’était pas prêt à comprendre son travail, spécifia à son neveu à qui elle légua son œuvre, que rien de devait être révélé avant vingt ans après sa mort. C’est donc lors d’une exposition consacrée au spirituel, en 1984 et à Los Angeles, que cette artiste à part fut révélée au monde de l’art et au public. Émergent alors plus de 1000 tableaux aux inspirations bucoliques, aux influences spirituelles très fortes, marqués par le paranormal, la nature, les mathématiques et la religion.

 

Intrigués, curateurs et spécialistes de l’abstraction découvrent qu’à la mort de sa jeune soeur Hermina, Hilma commence à s’intéresser à la théosophie et à l'anthroposophie, un mouvement de pensée inventé par Rudolf Steiner, qui se veut proche de la nature et qui voit le monde comme mû par des forces spirituelles. Avec cinq autres femmes artistes, Hilma s’initie au spiritisme pour tenter de communiquer avec sa sœur décédée. Ces expériences et rencontres influencent grandement sa conception de l’art et ses créations. Hilma, qui considère que son art permet de transmettre un message aux hommes, va même plus loin en expérimentant la “peinture automatique”, créant par exemple en état de transe.

 

En avance sur son temps et guidée par des forces invisibles, Hilma af Klint traduit la géométrie de l’univers en points, lignes, motifs et couleurs au travers d’une œuvre picturale monumentale et prolifique, classée en catégories et sous-catégories, documentée, annotée. Un travail titanesque, impressionnament organisé, qui nous fut livré par son neveu  Erik af Klint. La découverte tardive de cette peintre totalement romanesque nous pousse à l’interrogation. Combien d’artistes, et notamment de femmes artistes, cachèrent leurs œuvres ? Combien d’Hilma af Klint nous ont échappées ?