Il était une fois...Emile Bernard


Le début de l‘été avec Émile Bernard (1868-1941)

Émile Bernard nait à Lille dans une famille bourgeoise et aisée qui travaille dans le négoce du textile. Emile Bernard est un jeune homme d’exception, intelligent et cultivé, nourri de l’art des musées et des galeries,  mais il est rebelle à tout enseignement académique. En 1878, Il est expulsé des Arts décoratifs pour indiscipline...

Lorsqu’il arrive à Paris en 1881, il s’inscrit à l’atelier Cormon, c’est là qu’il rencontre son ami Louis Anquetin, avec qui il « expérimente »...et l’année suivante Toulouse Lautrec qui lui fera découvrir la vie nocturne de Montmartre. C’est dans ce Paris incroyable qu’il découvre l’Impressionnisme. Il croise Van Gogh en 1886, puis Charles Laval et Eugène Boch...toujours dans ce même atelier dont il sera exclu pour « insubordination » en raison de ses idées progressistes. Il participe à ce titre à part entière à l’histoire du début de l’Art Moderne.

Esprit spéculatif, passionné de théorie esthétique, il met au point une technique : « le cloisonnisme » ; il peint en larges teintes plates qu’il cerne d’un trait sombre, sans ombre ni perspective.


En 1886, viré de l’atelier Cormon, il est jeune et pleins de curiosité, il découvre Cézanne en achetant ses couleurs dans la boutique du père Tanguy, rue Clauzel à Paris (et oui!). Ce brave breton aime ses artistes et lui parle de « papa Cezanne » et de la Bretagne.

Il décide de partir à pied pour faire un voyage de 900kms à travers la Bretagne jusqu’à Pont Aven. Il admire cette lumière, cette nature sauvage de mer et de Landes, ces monuments pieux, ces légendes et ces coutumes. La magie opère.

C’est en 1888 qu’il  rencontre Paul Gauguin à saint Briac puis Pont Aven. Les deux artistes s’admirent mutuellement, se regardent, se critiquent tout en faisant des recherches communes, ils tendent vers une synthèse de leur peinture qui s’oppose à la vision analytique des impressionnistes. Ils élaborent un nouveau style qui s’inspire des primitifs italiens et de l’estampe japonaise, c’est le Synthétisme. Il faut peindre de mémoire, renoncer au travail en plein air : c’est à l’esprit d’interpréter le sujet et non plus à l’œil de le copier fidèlement. « La bretonne dans la prairie » est le tableau clé, c’est l’acte de naissance du Synthétisme.«...Je marchais au symbolisme par la synthèse...il faut simplifier le spectacle pour en tirer le sens. Il faut en quelque sorte en faire le schéma... »

En 1889, une mémorable exposition présente les tableaux « du groupe impressionniste et synthétiste » au café Volpini. Emile Bernard se voit injustement qualifié « d’élève » par la critique. Gauguin repart à Tahiti sans réfuter ce propos. Émile Bernard ne le lui pardonnera jamais et cela met fin à une amitié devenue orageuse. Ce dépit l’habitera toute sa vie. Blessé, il cherche dès lors à s’émanciper de son style de Pont-Aven et met tout son talent à réaliser des oeuvres qui le démarqueront de Gauguin.

Émile Bernard s’engage alors dans une direction plus mystique et idéaliste. Il participe à l’exposition des Nabis en 1892. A partir de 1897 sa peinture s’inspire de l’art Byzantin et médiéval et plus tard des maîtres de la Renaissance italienne auxquels il voue un culte exclusif. 

Époque formidable, âge d’or de la peinture...Émile Bernard va tous les croiser un jour où l’autre chez le père Tanguy, à Pont-Aven ou dans les expositions fréquentes et variées :  Pissarro, Signac, Laval, Maurice Denis, Anquetin, Van Gogh, Gauguin ...chacun envoyant à l’autre son autoportrait pour marquer son style et sa différence. Cézanne restant « le papa » de tous comme disait le père Tanguy.